Années 60-70 : faire son cinéma en restant soi-même

               
Certains deviennent acteurs après avoir appris le métier, d'autres n'ont pas ce mal, ils se contentent de glisser leur personnalité dans différents rôles. Gabin, Delon, Ventura sont eux mêmes avant d'être le personnage qu'ils jouent, on appelle ça le charisme, on appelle ça être acteur né.

A sa manière, André n'aura pas non plus à se forcer pour être à l'aise devant une caméra puisqu'il jouera presque toujours son propre rôle."Le gentleman, l'aventurier, le prêtre et l'escroc n'appartiennent à aucune classe, ils s'accommodent aussi bien de l'étiquette des cours que du sans gêne des rustres". Cette phrase lui va comme un gant de cuir noir.

C’est sur le tard, à 44 ans qu’il fait sa première apparition au cinéma, dans un film dont la vedette est une star montante de la chanson française : « D’où viens tu Johnny ? ». André y est un patron de boite de nuit un brin trafiquant, pas totalement un rôle de composition d’après Noel Howard, le réalisateur.

On le reverra également dans le film "Un idiot à Paris", où il incarne un chauffeur de taxi plus vrai que nature.

Un sympathique coup d’essai qui ne sera transformé que 3 ans plus tard, lorsqu’ il reçoit un coup de fil de Michel Audiard, ami avec lequel il partage depuis longtemps la passion du cyclisme, le goût pour la bonne bouffe et le sens des formules à l’emporte pièce. Michel tourne un film sur la côte d’Azur, il lui manque un acteur pour un rôle de truand et il a naturellement pensé à son pote André, qui ne se fait pas proposer 2 fois le voyage pour aller retrouver Lino Ventura, Michel Constantin, Mireille Darc et Jean Lefèvre qui jouent dans ce qui reste un des meilleurs films de Georges Lautner : « Ne nous fâchons pas ».

André y joue le rôle d’un truand qui a besoin d’un coup de main pour récupérer l’argent qui lui servira en cavale, argent que lui doit Léonard Michalon, un bookmaker véreux et pleurnichard interprété par un Jean Lefèvre en grande forme. Il incarne ainsi pour la première fois le rôle dans lequel son physique le catalogue, celui du dur, de l’affranchi, du gars avec qui il vaut mieux ne pas avoir d’histoire.

Comme il le dit lui même, «Avec ma gueule, je ne pouvais pas jouer les amoureux romantiques ....» ou , « J'ai bien pensé faire dans l'escroquerie mais avec ma gueule, c'était pas possible ». Finalement, c’est son ami François Marcantoni qui le décrit le mieux : « Une vraie gueule de mandat d’arrêt ! »

André fait du cinéma pour se faire plaisir et pour faire plaisir aux copains mais conserve parallèlement son activité d’Agent / Directeur artistique.

Les films passent, l’amitié avec Michel Audiard et Georges Lautner reste. C’est eux qui en 1967 offrent à André son plus grand rôle au cinéma, un rôle inoubliable dans un film incontournable : André est Quinquin dans « Le Pacha », où il croise le flingue et la réplique avec Jean Gabin, Robert Dalban et Dany Carrel.

André / Quinquin y est l’incarnation du gangster sans état d’âme, glacial, qui organise un braquage réglé comme du papier à musique avant de flinguer impitoyablement ses complices un à un pour récupérer leurs parts du butin. Sa seul erreur, avoir refroidi le « pote » du commissaire Joss (Jean Gabin). Toute l’atmosphère du film traduit l’affrontement entre 2 mondes, ceux des Truands et de la Police, incarnés par 2 hommes, André / Quinquin et le commissaire Joss / Gabin : les dialogues lapidaires, les paysage désolés (plaines gelées en hiver), la musique, la scène finale dans une distillerie désaffectée, le ton est donné. Quelques répliques de ce film sont devenues des classiques du genre:
Jean Gabin à Robert Dalban: « J’pense que quand on mettra les cons sur orbite, t’as pas fini de tourner »

André Pousse – Dany Carrel « AP – J’ai des envies de voyage. L’Océanie, Bora Bora, les vahinés… Tu connais ?, DC – Pourquoi tu veux m’emmener ?, AP – On n’emmène pas des saucisses quand on va à Francfort » 

               
Jusqu’au début des années 80, André apparaîtra ainsi dans plus de 40 films, dont certains classiques, travaillant avec les meilleurs réalisateurs : Georges Lautner, Michel Audiard, Henry Verneuil, Jean-Pierre Melville, Jacques Deray, Gérard Pirès, José Giovanni et les plus grands acteurs : Alain Delon, Jean Louis Trintignant, Michel Serrault, Jeanne Moreau, Simone Signoret, Annie Girardot, Charles Vanel, Bernard Blier…mais toujours entre amis.
               
Plus tard et jusqu’à nos jour, André tournera encore de nombreux films pour le cinéma ou la télévision. A partir des années 90, il multiplie notamment les apparitions dans des courts métrages, soutenant ainsi les débuts de jeunes réalisateurs. Il est toujours régulièrement parrain et/ou membre du jury de festivals de courts métrages, qu’il anime de sa verve, parfois accompagné de Georges Lautner lui-même.

André Pousse dans «Deux bananes flambées, l'addition», (1998)

André Pousse / Georges Lautner

               

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